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Comptes-rendus d'événement

Les boursiers PDWA de Côte d'Ivoire discutent politique et proposent

de Victor Emmanuel Ekwa Bebe III

Alumni et boursiers actuels ont réfléchi sur les récentes municipales et régionales

Des jeunes actifs de la société civile ivoirienne se sont réunis vendredi 22 septembre 2023 à Abidjan pour échanger leur point d’analyse et partager leur regard de jeunes sur les dernières élections tenues le même mois de septembre 2023 en Côte d’Ivoire. Réunis dans un réseau d’Alumni du programme régional de bourse PDWA de la Konrad-Adenauer-Stiftung (KAS), ils sont une dizaine à avoir pris part à ce cadre de discussions semestriel du réseau en présence de Dr. Stefanie Brinkel, Représentante résidente de la KAS à Abidjan, Kevin Anvo, Chargé de Programme PDWA et Gnamien Attoubré, président du réseau des boursiers de Côte d’Ivoire et de l’ensemble des boursiers Afrique de l’Ouest.

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Dr. Stefanie Brinkel, Représentante Résidente KAS Abidjan et Directrice PDWA

« Consciente de l’importance de la participation de la jeunesse au processus d’amélioration du dialogue politique et convaincue que le renouveau se fera par le biais d’une participation active des jeunes (…), la KAS se réjouit de vous donner l’occasion d’échanger sur des sujets qui font partie intégrante de votre quotidien et sur lesquels votre regard en tant que jeune est plus que crucial », avait mentionné Dr. Stefanie BRINKEL lors de son allocution.

Kevin Anvo, Chargé de Programme KAS PDWA
Séance de travail, vue partielle

Pour ces jeunes, membres du Réseau des Alumni PDWA, « les élections municipales et régionales couplées du 02 septembre 2023 étaient non seulement un test de la maturité démocratique du pays, mais également une opportunité pour la jeunesse et les femmes de jouer un rôle significatif dans la gestion de leurs collectivités territoriales respectives », indique Ivoire Estelle Zadi, Alumni de la fondation KAS et présidente de la Fondation Bla-Kpa. « Cependant, celles-ci ont révélé que, contrairement à ce qui est prôné, l'environnement politique ne favorise pas la participation active des jeunes qui, s'avère l'une des conditions essentielles pour assurer une démocratie inclusive et équilibrée. A cet égard, il paraît judicieux d'encourager l'adoption d'une loi fixant un quota de 20% de jeunes sur les listes des partis politiques impliqués dans les élections locales », a tenu à préciser le Secrétaire général du CNJCI, Arnaud AMANI, également boursier de la fondation KAS.

Mme. Yolande Adjé, en charge des finances du programme des bourses
Arnaud Gohi, Alumni bourse KAS PDWA et Pdt Garde citoyenne
Le Chargé de Programme Kevin Anvo et la Représentante Résidente Dr. Stefanie Brinkel

Au terme des échanges, Arnaud GOHI, membre du Réseau des Alumni PDWA et président de l’ONG Garde citoyenne, a attiré l’attention de tous, notamment de toute la classe politique en soulignant que « si les élections locales ont globalement été apaisées, elles ont tout de même marqué la nécessité d'enrichir l'offre politique, de moderniser le système électoral et de travailler à des citoyens intègres et impliqués. »

Safiatou Tanou, boursière KAS PDWA

Les boursiers, anciens et nouveaux, ont également tenu à partager leur réflexion dans un document à la portée de tous. En voici le contenu :

 

 

ELECTIONS COUPLEES MUNICIPALES ET REGIONALES : ENTRE DOUTES ET ESPOIRS ?

 

Le 02 septembre 2023, les ivoiriens étaient invités aux urnes pour l’élections couplées municipales et régionales. Cette élection, même si elle s’est relativement bien déroulée sur l’ensemble du territoire, suscite encore des interrogations sur l’efficacité de la Commission Electorale Indépendante ainsi que le cadre électoral.

 

Le 02 septembre 2023, les électeurs ivoiriens étaient appelés aux urnes pour élire les conseillers régionaux et municipaux. Contrairement aux élections locales de 2018 qui ont été émaillées d’importantes violences et causé la mort de cinq (5) personnes, celles de 2023 se sont déroulées dans un climat relativement apaisé. Cette élection, qui s’est voulu inclusive, a suscité un réel engouement au sein des populations. Pour le Parti des Peuples Africains (PPA-CI) créé après le retour de l’ex-président Laurent Gbagbo, c’était le premier grand test.

 

Le RHDP renforce son hégémonie ; l’opposition cherche ses repères

De cette élection, le RHDP sort plus que renforcé. Sur les résultats de trente (30) régions disponibles sur les 31 du pays, le RHDP a remporté une victoire écrasante en gagnant vingt-cinq (25) régions. Au niveau des municipales, sur les 199 communes dont les résultats sont également disponibles sur les 201 communes que compte la Côte d’Ivoire, le RHDP est sorti en tête en remportant 123 communes. Autant dire que le RHDP s’impose comme le plus grand parti politique en termes d’assise électorale en Côte d’Ivoire.

En face, le PDCI-RDA essaie de se maintenir malgré le décès de son président Henri Konan Bédié le 01 août dernier. Le vieux parti a réussi à mettre la main sur trois (03) régions et 22 communes.

 

Pour le PPA-CI, cette élection a été presqu’une débâcle. En effet, les quelques rares sièges qu’il a remportés a été le fruit de l’alliance par endroit entre le parti fondé par Laurent Gbagbo et le PDCI-RDA. Cette alliance a permis de remporter une région et 10 communes. Le Front populaire ivoirien mené par Affi N’guessan a quant à lui perdu son seul siège au régional. En effet, le président du parti a été battu par Véronique Aka, candidate du PDCI-RDA. A la place de la recomposition du corps électoral attendu, cette élection a viré en une démonstration de force du parti au pouvoir.

 

Mais s’il est clair que cette élection s’est déroulée dans un climat relativement apaisé, il n’en demeure pas moins que de nombreux problèmes structurels persistent. Dans la majorité des cas, la plupart des jeunes ont été quelque peu déçus du contenu d’ensemble de ces élections, et en attendaient un peu plus. Nous, en tant que jeunes acteurs de la société civile et membres du Réseau des Alumni du programme régional Dialogue Politique en Afrique de l’Ouest de la Konrad-Adenauer-Stiftung, avons recueilli quelques inquiétudes partagées dans le regard de la jeunesse ivoirienne sur ces scrutins couplés du 02 septembre 2023 en Côte d’Ivoire.

 

De la pauvreté de l’offre politique et de la transhumance électorale

Les conseils régionaux et municipaux sont des structures qui rentrent dans le cadre de la décentralisation. Ils ont donc pour mission de construire le développement au niveau local. Dans une telle configuration, la campagne pour cette élection devrait être le lieu pour exposer des projets structurés et cohérents sur les thématiques qui touchent directement les populations. Malheureusement, très peu de candidat de la majorité comme de l’opposition ont accentué leur discours sur cet aspect.

 

A la place, les débats ont plus tourné autour des personnes, alimenter que par un verbatim ad hominem. Dans le même temps, le ‘’chantage aux infrastructures’’ érigé en règle d’or de clientélisme électoraliste a été institué comme moyen par excellence pour contraindre psychologiquement l’électorat. En effet, certains candidats du RHDP, ne se sont pas passés du dos de la cuillère pour faire savoir que le choix d’un candidat autre que celui du pouvoir sera un vote sanction contre la population elle-même, car celle-ci sera privée d’infrastructure ou d’importants investissements. Une pratique bien loin de l’éthique politique et des textes fondamentaux.

 

À la place de projet séduisant, le phénomène de transhumance reste une alternative pour certains candidats. Appelé souvent « deportivo », ce phénomène consiste à faire enrôler des électeurs non-résidents afin de voter pour le candidat le plus offrant qui assure leur per diem et transport. L’argent est donc devenu le mobile de vote pour nombre d’électeurs. Cette situation est un danger pour la jeune démocratie ivoirienne. D’ailleurs, ce fléau biaise souvent le jeu électoral et ‘’impose’’ à des populations des élus qui n’ont pas la primeur de leur vote. À ces problèmes déjà nombreux, il faut ajouter les imperfections de la Commission Électorale Indépendante.

 

La CEI et ses nombreux manquements

Comme lors des précédentes élections, plusieurs manquements ont été observés dans l’organisation des élections. Les problèmes logistiques sont nombreux à savoir l’ouverture tardive de certains bureaux et le retard mis dans la mise à disposition des éléments pour le vote. En plus de ces problèmes, s’ajoute la lenteur dans la proclamation des résultats.

 

Dans cet environnement où la transparence n’est pas maître-mot, les soupçons de pratiques anti-démocratiques de nature à entacher la sincérité du scrutin a poussé à l’annulation des résultats dans plusieurs localités par le Conseil d’État. Notamment dans le Guémon. Aujourd’hui, plus que jamais, il est indispensable de repenser le système électoral et de (re)construire un électorat responsable pour le renforcement de la démocratie.

 

Des pistes de solutions pour la transparence électorale

Depuis des décennies, la CEI est au cœur des tensions lors des élections. Pour cause, cet organe, qui doit arbitrer le processus, est composé de membres de partis politiques. C’est tout logique que des tensions subsistent autour de cette institution. Il y a donc lieu de réfléchir sur une nouvelle monture de cette structure. Il est temps de penser à la confier à des acteurs, non-partisans comme la société civile et les guides traditionnels et religieux.

 

Pour ce qui est des acteurs politiques qui se rendent coupables de fraude avérée ou de comportements anti-démocratiques dont le but est manifestation d’entraver la bonne marche du processus, un cadre légal devrait être mis en place afin de les sanctionner. 

 

En ce qui concerne l’électorat, il est nécessaire de travailler au renforcement de leur capacité sur l’importance du vote et le rôle de chaque autorité élue. Dans ce sens, le travail de formation des populations doit être permanent. Car au final, les actions menées dans ce sens par la CEI à l’approche des élections ne permettent pas de régler la question en profondeur. La CEI devrait s’appuyer sur ses démembrements au niveau local pour mettre en place des camps de l’électeur afin de sensibilisation la population sur les dangers du marchandage des voix. Pour ce qui est de la transhumance électorale, il est temps de revoir les dispositions en matière de vote de sorte à combattre efficacement cette pratique qui biaise souvent le choix des populations en ce qui concerne les élections locales, voire affecte la sincérité du scrutin.

 

Fait à Abidjan, le 22 septembre 2023

Par la coordination ivoirienne du Réseau des Alumni PDWA

 

Note : Le Réseau des Alumni PDWA est un réseau sous régional présent dans 4 pays (Bénin, Côte d’Ivoire, Guinée et Togo). Le Réseau rassemble l’ensemble des boursiers actuels et anciens du Programme régional pour le Dialogue Politique en Afrique de l’Ouest (PDWA) de la Konrad-Adenauer-Stiftung dont le bureau régional se trouve à Abidjan. Le Réseau comprend plus d’une centaine de membres et intervient dans les domaines de la Démocratie et de la Bonne Gouvernance, de la Sécurité et des Relations transnationales, de l’Intégration et de la coopération économique sous régionale, ainsi des défis prégnants de la jeunesse ouest-africaine.

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Interlocuteur

O. Kevin Anvo

Portrait Kevin Anvo

Chargé de Programme
Relations extérieures - Bourse régionale PDWA

kevin.anvo@kas.de +225 27 22 48 1800

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